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Patricia : « Moi, femme, je me retrouve sans choix, sans espoir. »

Je suis une maman de 46 ans, et depuis 3 ans je souffre de cancers, fibromyalgie et neuropathie. D’une vie active, je suis passée à une vie de maman solo avec 3 filles, sans pension alimentaire, et dépendante de mon nouveau compagnon.

Oui, comme une enfant, je dois demander, quémander mon petit argent de poche !

Lui fait de son mieux, il travaille et a mes filles et moi à charge. Il n’a aucune reconnaissance, ni même pour ses impôts, mais par contre toutes les obligations ! Il paye chaque mois deux pensions alimentaires d’une autre union. Il a un salaire correct, et pourtant on vit en dessous du minimum de pauvreté.
Si j’étais valide, je pourrais espérer changer la situation en trouvant un emploi. Mais non, ce n’est pas le cas ! Je suis devenue dépressive, dépendante financièrement et ce pas par choix, oh non !!!
Comment peut t-on nous laisser ainsi, en situation de mendicité ?!

Psychologiquement j’ai déjà pensé au pire, j’ai essayé le pire, vu que je suis un boulet qui pompe et ne sert à rien… Heureusement je suis aidée psychologiquement maintenant.

Acheter même une culotte à ma fille passe par mon compagnon, c’est violent, vraiment très violent !

Il n’est pas leur père. Il faut qu’on nous entende ! Si je demandais le RSA qui serait refusé à cause des revenus du conjoint je trouverais ça normal. Pourquoi ? Car  je pourrais me débrouiller pour travailler, quand on veut, on peut, puisqu’on est valide ! 

Mais en invalidité, le « quand on veut, on peut » n’est pas possible ! J’en pleure et encore je cache mon ressenti aux gens. Moi, femme, je me retrouve sans choix, sans espoir.

C’est bête mais même pour dire merci à mon compagnon qui est aussi mon infirmier, mon homme de ménage, mon taxi… Je ne peux lui acheter un cadeau qu’avec ses sous. J’essaie de me débrouiller, mais c’est très dur. Ma peau porte les stigmates de mon mal être, et mes filles souffrent avec moi.

Une vie où les jours passent un à un, où on se bat pour essayer de moins souffrir. Nous sommes les oubliés, nous vivons dans la honte, on perd notre honneur, nous n’avons plus aucune indépendance .

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Anne : « Une vie en mode pause »

Je suis tétraplégique de naissance et j’ai une élocution difficile. Dés qu’on m’a octroyé l’AAH, à mes 20 ans, contre l’avis de mon entourage, j’ai décidé de louer un appartement et de vivre comme tout le monde dans la société. J’ai obtenu une licence de psychologie puis je me suis mariée. Nous avons eu un enfant.

Tous les ans on faisait attention de ne pas dépasser le plafond de l’AAH : mon mari prenait ses heures supplémentaires en repos compensateur. Les fins de mois étaient un peu compliquées mais nous y arrivions…

Je pensais avoir réussie ma vie en parfaite inclusion dans ma ville car j’étais très active associativement et politiquement pour l’accessibilité de ma commune, même si je n’ai jamais eu d’emploi. Je suis aussi connue pour avoir été « gilet jaune ».

Mais ma vie a basculé le 30 janvier 2020 lorsque mon fils est parti vivre en cité U pour poursuivre ses études car dans ce mois-là la CAF m’a diminué mon AAH et mon mari a travaillé à temps partiel, car pourquoi travailler pour avoir le même pouvoir d’achat ? 

Sauf qu’en ayant un mari valide la CAF a refusé de recalculer mon AAH sur l’année en cours donc dans un premier temps j’ai eu peur de ne pas pouvoir payer notre crédit immobilier et de nous retrouver SDF.

À 50 ans, après une petite dépression, nous nous sommes pratiquement désociabilisés pour pouvoir survivre, nous n’avons pratiquement plus aucun loisirs, nous n’invitons que très rarement nos rares amis qui sont restés. Fini aussi de se sentir femme en allant chez l’esthéticienne et le coiffeur !

Mais personnellement ce qui a été le plus dur à vivre c’est cette ségrégation que j’avais occulté entre handicapés et valides, ça a été vraiment traumatisant de m’entendre dire « mais madame il fallait épouser un handicapé et pas un valide qui travaille »  ! 

Depuis 1 an et demi, j’essaie de trouver une solution pour vivre et non survivre mais ayant acheté un appartement à crédit (d’ailleurs les banques comptent l’AAH pour le crédit), nous ne pouvons pas divorcer et nous devons attendre pour vendre !

Depuis 1 an nos parents nous ont aidé surtout lorsque mon fauteuil est tombé en panne car nous n’avions plus les moyens de le faire réparer et pour l’instant la solution provisoire est la banque alimentaire donc nous sommes devenus des mendiants ! Ce qui n’est pas évident à vivre !

Nous voudrions pour notre couple que la loi passe car ce calcul de l’AAH est un frein à la carrière professionnelle de mon mari et nous attendons pour faire des projets d’avenir…

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Michèle : « Je ne veux pas finir ma vie déjà écourtée par la maladie comme une mendiante »

Si je témoigne c’est que depuis quelques années je suis atteinte d’un cancer du sein d’emblée métastatique, donc pas guérissable, juste soignable, ensuite j’ai développé un autre cancer, du poumon cette fois. J’étais déjà atteinte d’un lupus pour lequel on a du arrêter le traitement durant 4 ans pour des raisons d’incompatibilité avec la chimio et du coup il est en train de s’aggraver…

Depuis le début je touchais l’AAH et le complément de ressources soit un peu plus de 1100 €. Je suis en couple, mon conjoint a un salaire moyen et moi aucun revenu. Cet équilibre a changé en juillet quand mon fils a quitté la maison : on m’a supprimé le complément de ressources et une partie de l’AAH. Je ne perçois plus que 590€ et on a plus le droit à l’APL donc on doit payer notre loyer intégralement.

Cela m’oblige à avoir recours à mon conjoint pour compléter mes revenus. Je trouve tout à fait injuste de tenir compte des revenus d’un concubin puisque dans la logique les concubins ne sont pas obligés l’un envers l’autre contrairement aux gens mariés

Il est une chose, lors du départ d’un enfant du foyer, de retirer le CR ou l’APL si l’on dépasse, mais toucher à l’AAH c’est incompréhensible ! D’autant que l’on est pas moins handicapé ou empêché de travailler du jour ou l’on se retrouve à deux.

J’espère vivement que nos députés sauront rétablir les choses afin que nous ne terminions pas notre vie déjà écourtée par la maladie ou les handicaps comme des mendiants à la charge des autres surtout quand on a travaillé et cotisé depuis l’âge de 16 ans comme c’est mon cas.