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Olivier : « Je suis un citoyen de la République Française oublié… »

J’ai 50 ans, en couple. Je suis handicapé à 80 % depuis 1997, je touchais l’ AAH. Mais depuis 10 ans, la CAF ne me la verse plus à cause du revenu de ma conjointe au SMIC ! (et pas 2500 € mensuels comme annoncé par la secrétaire d’Etat chargée au Handicap).

Je souffre d’une maladie génétique orpheline incurable et dégénérative. Cela fait 24 ans maintenant, plusieurs fois opéré, de nombreux médicaments pour me tenir en vie et soulager des douleurs. De nombreux examens à l’hôpital, mais pas n’importe lequel. Des heures de route pour aller à l’hôpital sur Paris (car à la campagne il n’y a pas assez de médecin, et très peu d’hôpitaux spécialisés). 

J’ai rencontré l’amour d’une femme, qui m’accepte et qui me soutient tous les jours. Elle vit le handicap avec moi, sans peur, sans me quitter comme je l’ai vécu par le passé.

Il y a 10 ans, nous avons voulu un enfant et après de nombreux essais, bonne nouvelle, elle est enceinte. Mais tragiquement, Ilona est morte née. Je ne m’en suis jamais remis. S’en est suivie une grave dépression.

Voilà ce qu’est notre triste vie. Pour subvenir à nos besoins, ma femme valide fait des heures supplémentaires comme une acharnée. Quand je la vois à mes côtés, c’est pour dormir, j’en peux plus. Elle me comprend, mais parfois elle en a marre ! Elle est fatiguée de cette situation, elle m’en veut et je m’en veux.

Je lui ai même proposé de divorcer afin de tricher comme beaucoup d’autres couples. Je pourrais  retoucher mon AAH dont j’ai le droit. Elle a refusé,  étant trop honnête et gentille.

 Alors je travaille, des petits boulots en intérim… J’en paye physiquement le prix ensuite.  Puis j’enchaine des CDD jusqu’à ce que l’employeur ne reconduise pas le contrat pour inaptitude au travail. Bien oui ! Je suis handicapé à 80 % . Je devrais pouvoir toucher l’AAH ! S’en suivirent d’autres boulots précaires et épuisants. Puis j’ai réussi a être titularisé pour un travail ! J’ai posé des arrêts maladie, puis un accident de voiture du à la fatigue. Maintenant je suis en arrêt.

Les collègues me reprochent que je suis différent, ne veulent pas croire que je suis handicapé.

Mais maintenant que je suis titulaire, la direction cherche une solution pour me virer. On m’envoie voir l’assistante sociale. Elle me dit que vu mon état de santé, je devrais  toucher l’AAH ! QUELLE IRONIE ! Je n’ai pas d’AAH puisque les revenus de ma femme sont trop élevés ! Au SMIC !

Conclusion : dans 9 mois je serai licencié, sans salaire, et toujours sans mon AAH, pourtant accordée par la MDPH depuis 1997.

J’espère que le 17 juin, la loi sera votée pour qu’on ne prenne plus en compte les revenus du conjoint.
J’appauvris ma femme, j’ai fait plusieurs tentatives de suicide.

Manifester ça sert à rien , les courriers au gouvernement ne servent à rien, certains ne répondent même pas. Sans parler de l’hypocrisie de ceux qui sont nommés pour nous représenter et améliorer notre situation en France. Sur les groupes Facebook, certains font la grève de la faim mettant leur vie en danger,  mais rien ne bouge . 

Nous sommes laissés pour compte en 2021. Nous sommes le pays des droits de l’Homme. Je suis un citoyen de la République Française oublié, je suis révolté ! 

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« Tout en continuant à assurer quotidiennement mon rôle d’aidante… »

Mon conjoint est reconnu handicapé à 80 %, il a récemment perdu 700 euros d’AAH et 100 euros de Majoration pour la Vie Autonome (le versement de la MVA étant conditionné au fait que l’adulte handicapé perçoive l’AAH à taux plein) car notre foyer est depuis cette année au-dessus du plafond de revenus pour un couple sans enfant, ce plafond est actuellement fixé à 1630 euros de revenus par mois pour deux personnes. A noter que ce plafond a été baissé par le gouvernement actuel au même moment où l’AAH était revalorisée.
Aux yeux de la loi mon salaire de 1660 euros nets est trop élevé pour que mon conjoint ait le droit de continuer à percevoir à taux plein son unique revenu de subsistance qu’était l’AAH, soit 902 euros euros par mois.

C’est une grande injustice car de ce fait nous basculons tous les deux dans la précarité financière :

nous devons désormais vivre à deux presque uniquement sur mon seul salaire mon mari ne touchant plus que 200 euros d’AAH (ce qui est moins que le montant mensuel du RSA).

Nous nous aimons et nous ne voulons pas nous séparer car nous sommes ensemble depuis très longtemps, avant même le diagnostic du handicap.


Mais cette situation est très difficile à vivre pour nous deux : mon conjoint était déjà dépendant physiquement de moi du fait de son handicap et il l’est maintenant aussi financièrement. De mon côté le fait de devoir assumer seule financièrement pratiquement l’ensemble des dépenses de notre foyer tout en continuant à assurer quotidiennement mon rôle d’aidante est très éprouvant. 

Dans l’absolu, je ne serais pas contre le fait d’assumer seule les membres de mon foyer si mon salaire me le permettait mais ce n’est malheureusement pas du tout le cas car les plafonds en vigueur fixés par la loi sont si bas que nous devons vivre à 2 avec 1800 euros en étant locataires. Pour me permettre d’assumer seule les dépenses mensuelles de mon foyer il faudrait que les plafonds pris en compte pour un couple soient relevés à au moins 2 fois le SMIC net (hors AAH).

Malheureusement la réalité c’est que nous avons beaucoup de mal à « joindre les deux bouts » et qu’avec 1800 euros par mois nous bataillons pour surnager au dessus du découvert

(notre seul loyer mensuel s’élève à 800 euros car mon travail se situe dans une grande ville et ne me permet pas d’habiter à la campagne où les loyers sont moins chers). Ce qui est encore plus difficile à supporter c’est de ne pas voir le bout du tunnel, de ne pas avoir de prise sur cette situation que nous n’avons choisie ni l’un ni l’autre, de se dire que notre situation financière précaire n’évoluera favorablement que si la loi change grâce aux députés :

mon salaire n’augmentera pas et mon conjoint demeurera handicapé et donc empêché d’accéder à un emploi rémunéré comme les personnes valides.


Aussi nous sommes mobilisés (signature de la pétition sur le site du Sénat puis des 3 pétitions en ligne sur le site de l’Assemblée Nationale, sollicitation des députés et des grands médias) pour que cette injustice cesse car le vote des députés en faveur d’un changement de la loi le 17 juin prochain est notre seul espoir pour avoir une vie digne et un futur plus serein. Parce que ce n’est pas juste d’imposer aux adultes handicapés et à leurs conjoints souvent aidants de vivre en mode « survie financière », sans aucun pouvoir d’achat, dans la crainte du découvert au moindre achat de médicament, acte médical non remboursé, cadeau d’anniversaire, place de cinéma ou paire de chaussures neuve.

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Gwen : « La solidarité dans un couple est déjà tellement présente à longueur de journée… »

Actuellement, mon mari a une invalidité à + 80%. Il a une inaptitude à vie pour le travail. Nous avons deux enfants de moins de 20 ans, nous touchons l’intégralité de son AAH soit 902 euros. Dans quelques années, si la loi ne change pas, nous n’aurons plus que mon salaire d’aide soignante pour survivre, et le mot est pesé.

Comment peut-on comparer l’AAH avec le RSA ? Pour l’un des deux, le retour à l’emploi n’est plus possible. La solidarité familiale est primordiale mais sur le plan financier, comment accepter de dépendre de quelqu’un ? Quelle dignité reste-t-il à ses personnes que la vie a déjà cabossé ? 

Je voulais aussi ajouter que mon métier d’aide soignante me permet de voir dans mon service beaucoup d’aidants qui sont hospitalisés car usés moralement et physiquement. Il n’est pas rare de voir que les aidants décèdent avant leur conjoint.s.es atteint.s.es de handicap car ils.elles sont à bout. C’est malheureusement la triste réalité.

La solidarité dans un couple est déjà tellement présente à longueur de journée, je viens combler tout ce que mon mari ne peut pas faire seul ou pour les enfants.

Il fait tout son possible pour m’aider mais sa maladie le submerge vite et le fait craquer face au premier obstacle. Mon mari a une maladie invisible qui est encore plus compliqué à faire admettre, je dois gérer la maison, les enfants, l’école après ou avant mon travail.

En étant mariés, l’État fait des économies puisque seul, mon mari serait dans l’obligation d’avoir des aides, alors en plus nous supprimer l’AAH… Quelle injustice !