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Sarah : « Le handicap coûte cher… »

Partons d’un postulat très simple : le handicap coûte cher. Alors quand une partie des maigres ressources est supprimée, on ne s’en sort simplement plus.

Notre histoire est un coup de foudre. J’ai rencontré Cyrille en 2015. Cyrille est paraplégique depuis 2003. J’étais alors aide-soignante. Du fait de mon métier, je connaissais bien les handicaps moteurs, et n’ai donc eu aucun problème à m’adapter au sien.

Je savais qu’on rencontrerait quelques difficultés dans la vie (comme les abrutis qui se garent sur les places handicapées) mais je ne pensais pas qu’elles seraient aussi financières.

Cyrille touche l’AAH. Il a travaillé les premières années qui ont suivi son handicap mais pour des raisons de santé il a du complètement arrêter. Ce qui lui a donné le droit à une AAH plénière, de 816 euros par mois à l’époque où je l’ai rencontré. Naïvement et heureux d’emménager ensemble, nous ne l’avons pas caché. Son AAH est soudainement passée à 700 euros. Il faut se dire qu’à l’époque je gagnais 1300 euros net et des poussières, grassement payée comme beaucoup de soignants *sic*.

De là, l’angoisse de finir nos mois a commencé.

Cette angoisse n’a pas duré, car après un difficile parcours en PMA nous avons eu un magnifique bébé. Ce qui a augmenté notre plafond du calcul de l’AAH et Cyrille a retrouvé son allocation en totalité. 
Malgré tout, beaucoup de dépenses ont été engendrées. Quand vous êtes malade, vos médicaments sont pris en charge par la sécurité sociale ? C’est normal me direz-vous, vous en avez besoin. Et bien figurez-vous qu’une personne paraplégique doit payer son propre fauteuil roulant ! Donc sur 6000 euros le fauteuil (attention nous sommes en bas de gamme), mon mari a eu 500 euros de la sécu, 500 euros de la mutuelle et 1000 de la MDPH. Soit 4000 euros à mettre de poche.
Qui dit bébé, dit articles de puériculture.

Aujourd’hui RIEN n’est adapté pour les personnes en situation de handicap. Une conséquence naturelle du fait qu’elles n’aient pas le doit d’être en couple, logique…

Par exemple, pendant que je travaille, Cyrille doit emmener notre bébé à la crèche. Il nous fallait donc un siège auto sécurisé mais aussi pivotant pour qu’il puisse y installer notre fils. Hop 400 euros! 
Tiens en parlant voiture ! Une personne paraplégique doit se munir d’un véhicule à boîte automatique, donc plus cher déjà qu’à boîte manuelle. Le véhicule doit être suffisamment grand pour y entrer un fauteuil roulant et pas trop haut pour transférer dedans. Nous avons donc du acheter une vieille C5 à 7000 euros. S’ajoute à ça l’adaptation du véhicule, 5000 euros à avancer de notre proche et sur lesquels seulement 75% sont pris en charge par la MDHP. Conséquence ? Un joli crédit de 200 euros par mois à rembourser jusqu’en 2023…
Suite au Covid, le personnel médical a vu son salaire augmenter de 200 euros par mois. Il était temps ! Les soignants étaient jusqu’alors assez peu payés pour tout le travail accompli. Tous mes collègues étaient donc heureux de cette augmentation. Tout le monde sauf moi…

Passer de 1300 à 1500 signifie une baisse de l’AAH de Cyrille. C’est inévitable. Donc à nouveau des calculs, de l’angoisse, des crédits à venir…

Quoi que nous fassions, aussi dur que je puisse travailler, nous sommes condamnés à vivre avec environ 2000 euros par mois. Pas plus. Jamais plus. Malgré le cout des fauteuils roulants, malgré le cout d’une voiture qui nous est indispensable, malgré le cout des articles de puériculture, malgré le cout des vacances adaptées (si tant est que nous aurions les moyens de partir en vacances). Même le cout du Viagra n’est pas pris en charge ! Faire simplement l’amour, comme tout couple amoureux nous coute cher ! 

Tant que cette loi ne passera pas, nous sommes condamnés à survivre, sans projet concret, sans petit plaisir, sans emmener notre enfant en vacances, sans rien. Jamais.

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Sylvie : « Je suis outrée d’entendre parler de solidarité familiale… »

J’ai 50 ans, handicapée depuis l’âge de 27 ans : une rupture d’anévrisme, provoquée par les coups de mon conjoint. J’étais une femme battue et un caillou s’est formé sans que je le sache. Je suis partie avec mes deux enfants, j’étais aide soignante à domicile.

Mes parents ont tout fait : les démarches pour l’AAH et la pension d’invalidité. 890€ mensuels pendant des années, avec deux enfants ! Pas le droit à d’autres aides. Aujourd’hui, je suis mariée depuis 2016.  Mon AAH est maintenant de 375€  au lieu de 690€ . Mon mari est retraité, il a 1180€. Ce n’est pas la joie, je dépends de mon mari.

  • Loyer 490€
  • EDF 135€
  • Eau 45€
  • Prêt  250€
  • Assurance 300€
  • Mutuelle 290€
  • Téléphone internet 45€
  • Bracelet d’assistance SOS 63 € (que je vais devoir rendre faute d’argent)

Nous vivons chaque mois à découvert, et c’est de pire en pire.

Moi, je n’ai pas demandé à être handicapée et je suis outrée d’entendre parler de solidarité familiale : on dépend de mari, enfants, parents comme le dit la Secrétaire d’Etat en charge du Handicap.

Je ne divorcerai jamais même si la loi ne passe pas car j’ai un mari en or. Je ne prendrai plus mon traitement, je mettrai fin à ma vie, je souffre trop et j’ai bien compris que je ne manquerai pas à l’État .

Je suis tétraplégique gauche, aphasique, j’ai perdu ma mémoire épisodique, j’ai eu un double cancer du colon de graves problèmes de thyroïde. Sans compter les AVC.  Donc la mort ne me fait pas peur !

Aujourd’hui  je suis très en colère, je n’ai plus de dignité, je n’ai plus d’aide humaine ! C’est mon mari qui s’occupe de tout ! Malgré son âge et ses propres problèmes de santé.

Nous sommes les oubliés de la France ! J’espère que vous m’avez compris et que la loi passera. Car, sinon, cela aura des conséquences dramatiques.

N. B. : L’équipe du prixdelamour.fr a aidé Sylvie à rédiger son témoignage.